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Alimentation : comment s'y retrouver dans la jungle des allégations ?

Alimentation : comment s'y retrouver dans la jungle des allégations ?

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"Sans sucres ajoutés", annonce ce paquet de biscottes. "Le calcium et la vitamine D contribuent au maintien d'une ossature normale", affirme ce pot de fromage blanc. D'où sortent ces allégations inscrites à tire-larigot sur les denrées alimentaires ? Elles sont en fait très précisément réglementées par l'Union européenne.
Photo by Viki Mohamad on Unsplash

“Riche en vitamine C”, “allégé en sucre”, “source de fibres”, “le magnésium contribue à réduire la fatigue”... Ces messages fleurissent sur les emballages des denrées alimentaires et leurs publicités. Ces allégations vantent les propriétés des aliments ou de leurs composants, sur le plan nutritionnel ou de la santé. Elles ne peuvent pas être apposées au hasard : leurs conditions d’utilisation sont précisément régies par un règlement européen de 2006 (source), pour que ces informations soient claires, compréhensibles, exactes et confirmées par des preuves scientifiques. 

Comment ça se passe ? L’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA ou en anglais EFSA, European food safety authority) réalise l’évaluation scientifique de ces messages et décide si oui ou non, une nouvelle allégation pourra être utilisée dans les pays de l’Union européenne. Seules les allégations autorisées par cette procédure peuvent être utilisées par les fabricants… Si les conditions le permettent !  “C’est le principe des listes positives”, souligne la DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes). 

Et si, demain, vous voulez ajouter un item à ces listes, pour lancer votre marque de yaourts révolutionnaires ? Pour une allégation nutritionnelle, pas de chance, c’est uniquement la Commission européenne qui peut être à l’initiative du changement. Pour une allégation de santé, il vous faudra suivre la procédure décrite dans le règlement européen, notamment en préparant un dossier de demande d’autorisation, qui passera d’abord entre les mains de la DGCCRF. Ensuite, en fonction de l’avis, c’est la Commission européenne qui établit le registre des allégations autorisées. 

Mais penchons-nous sur ces deux grandes familles d'allégations, que l'on peut retrouver sur de nombreux produits alimentaires, de la bouteille de jus d'orange au plat préparé surgelé.

Les allégations nutritionnelles

Une allégation nutritionnelle fait référence à la teneur d’un nutriment dans un aliment… Ou à son absence. Elle peut aussi évoquer la quantité d’énergie ou de toute autre substance ayant des propriétés nutritionnelles bénéfiques. Où se trouve la liste des formules autorisées ? Tout simplement à l’annexe du règlement européen sur les allégations. Voilà quelques exemples courants :

  • “Faible teneur en matières grasses”

Pas beaucoup de gras dans ce fromage blanc ? L’allégation est autorisée si le produit ne contient pas plus de 3 g de matières grasses pour 100 g dans le cas des solides, ou 1,5 g pour 100 ml pour le cas des liquides (et 1,8 g pour le cas particulier du lait demi-écrémé). 

  • “Faible teneur en sucres”

Cette mention peut apparaître uniquement si le produit ne contient pas plus de 5 g de sucres pour 100 g… Ou 2,5 g de sucres pour 100 ml de liquides ! À titre de comparaison, il y a par exemple 10,6 g de sucres dans 100 ml de Coca-cola. 

  • “Sans sucres ajoutés”

Là, c’est sûr, aucun monosaccharide (glucose, fructose…) ni disaccharide (saccharose, lactose, maltose…) n’a été ajouté… Et aucune “autre denrée alimentaire utilisée pour ses propriétés édulcorantes”, d’ailleurs ! Si les sucres sont naturellement présents dans le produit, l’étiquette doit alors aussi mentionner “contient des sucres naturels”. L’exemple typique, c’est la compote de pommes, qui peut être très sucrée, même sans sucres ajoutés !

  • “Pauvre en sodium ou en sel”

L’aliment ne contient pas plus de 0,12 g de sodium (ou l’équivalent en sel : 1 g de sodium = 2,5 g de sel) pour 100 g ou 100 ml. Pour comparer : un paquet de chips lamba contient un peu plus de 0,5 g de sodium pour 100 g ! 

  • “Source de fibres”

Pour bénéficier de ce message, la denrée doit contenir au moins 3 g de fibres pour 100 g, ou au moins 1,5 g de fibres par 100 kcal. Le niveau supérieur, c’est “Riche en fibres” ! On parle du double : au moins 6 g de fibres par 100 g ou au 3 g par 100 kcal. 

  • “Source de…” pour les vitamines et les minéraux

Vitamine A, vitamine D, calcium, magnésium, zinc… Pour être officiellement une “source de”, un aliment doit en contenir “une quantité significative”, c’est-à-dire au moins 15% de l’apport journalier recommandé (AJR) pour 100 g ou 100 ml (ou par emballage si celui-ci ne contient qu’une seule portion). On passe ensuite sur la première marche du podium : les privilégiés qui sont “riches en…” doivent contenir au moins le double de la teneur requise pour l’allégation “source de…”. 

  • “Réduit en…” 

La réduction de la teneur de ce nutriment doit être d’au moins 30% par rapport à un produit similaire (avec des exceptions : 10% pour les micronutriments et 25% pour le sodium).

  • “Allégé” (en sucres, en matières grasses…)

On est sur les mêmes conditions que pour l’allégation “réduit en…” ! 

  • “Naturellement” ou “naturel”

Lorsqu’un aliment remplit naturellement l’une des allégations décrites ci-dessus, l’étiquette peut afficher en plus cette allégation. 

Les allégations de santé

Cette seconde famille d’allégations met en avant un lien entre un nutriment ou un aliment et la santé. On les retrouve dans un très fourni “registre des allégations nutritionnelles et de santé de l’Union européenne” (en anglais). 

  • Diminution d'un facteur de risque

Certaines allégations de santé revendiquent la diminution d’un facteur de risque… Par contre, elles ne peuvent pas affirmer qu’un nutriment prévient une pathologie ou la guérit, puisque chaque maladie a de multiples facteurs de risques.

En pratique, on ne peut pas “écrire “le calcium prévient l’ostéoporose”... Mais on peut affirmer : 

“Le calcium aide à réduire la perte de minéraux osseux chez les femmes ménopausées. Une faible densité minérale osseuse est un facteur de risque de fractures ostéoporotiques".  

Ces allégations relèvent de l’article 14 du règlement européen cité ci-dessus, tout comme celles qui sont liées au développement et à la santé des enfants

  • Les autres allégations de santé : croissance, fonctionnement de l’organisme, amaigrissement...

Celles-ci relèvent de l’article 13 (et sont listées ici) : elles concernent le rôle d’un nutriment ou d’une autre substance dans la croissance, le développement et les fonctions de l’organisme, les fonctions psychologiques et comportementales, l’amaigrissement ou encore le contrôle du poids (mais sans faire référence au rythme ou à l'importance de la perte de poids).

On trouve par exemple “le magnésium contribue à réduire la fatigue” (autorisée uniquement sur un produit uniquement “source de magnésium”), “l’iode contribue à une fonction cognitive normale” (pareil, uniquement pour les “sources de”) ou “la vitamine D contribue au maintien d’une ossature normale” (idem !). 

Voilà de bien belles allégations, mais qui vérifie tout ça ? En France, c’est la DGCCRF. En 2016-2017, elle a ainsi mené une grande enquête, pour contrôler les allégations mentionnées sur les emballages des produits alimentaires. Le résultat ? Pas mal, mais peut mieux faire, puisqu’il “s’avère nécessaire de poursuivre des contrôles sur les denrées de consommation courante présentant des allégations de santé”. 

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À propos de l'autrice
Lucie de la Héronnière
Responsable éditoriale
Lucie a travaillé pendant une dizaine d'années pour la presse et l'édition. Sa spécialité ? L'alimentation et ses enjeux. Pour Bien ou Bien, elle plonge désormais dans toutes les facettes de la consommation responsable.

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